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Le petit monde de Coquelicot
10 avril 2007

Récolte sirop d'érable

sirop_erable

J'ai reçu une lettre du Québec. En voici un extrait. Merci Jean-Claude de nous
faire revivre la récolte du sirop d'érable des temps jadis.


Bonsoir Martine

Ici tout baigne ! (façon de parler parce que nous avons encore beaucoup de neige).
Les érables coulent et nous fournissent un bon sirop. Mais c'est encore froid et
trop venteux pour avoir de grosses coulées, c'est-à-dire que la sève coule en
abondance.

Un érable d'un mètre de circonférence peut fournir quelque 10 litres de sève
dans une
journée. Comme il en faut plus de 40 litres pour produire 1 litre de
sirop, et
considérant que la saison ne dure que deux à trois semaines, il faut
entailler beaucoup d'arbres et travailler à bouillir toute cette eau dans la même
journée
sinon elle devient rance.

Plusieurs acériculteurs entaillent plus de 40,000 érables pour produire du sirop.
Ces personnes travaillent toute l'année pour se préparer à la saison des sucres
sans savoir quelle sera l'importance des "coulées".
Leur travail est aujourd'hui beaucoup plus facile que quand nous le faisions.
Aujourd'hui, des tubes relient les érables aux équipements de bouillage.
Les poèles brûlent du mazout plutôt que du bois. La technique fait en sorte que
le travail est plus facile, mais non pas plus rentable à cause du coût de ces
appareils et équipements.


syrup

Quand nous étions jeunes, un cheval tirait un gros baril de bois couché sur le
côté avec une ouverture sur le dessus où on versait l'eau d'érable. On allait
d'arbre en arbre avec nos deux grands seaux de 40 litres chacun, dans de la neige
qui parfois était très épaisse.
Nous défoncions jusqu'au fond parce que la neige fond plus par en dessous à cause
de la chaleur que dégage le sol que par le dessus. Les premières récoltes nous
épuisaient et épuisaient le cheval. Quand il y avait trop de neige et que les
chemins devenaient trop mous, il arrivait que le cheval tombe sur le côté entraîné
par le poids de l'eau d'érable.
C'était décevant comme tout parce que nous l'avions recueillie cette eau.
La perte d'un baril représentait bien des litres de sirop.

Pourtant, quand arrivait la fin de semaine, nous étions très heureux.
Les gens de la ville, nos parents, nos amis venaient se sucrer le bec.
Puis, comme pour tout bon folklore, une visite à la cabane n'aurait pas été une
visite si les gars, n'étaient pas venus ramasser l'eau avec nous. Youppie !
Nous savions où étaient les difficultés et c'est là que nous les faisions aller
les gars de la ville avec leurs bottes de ville inadaptées à ces corvées.
Puis quand la corvée de la cueillette de l'eau était terminée, nous pouvions nous
amuser. Comme on était à l'âge d'avoir des amoureuses, nous en profitions bien un
peu pour aller un peu plus loin leur montrer les merveilles de la nature.
Pas longtemps parce que nous étions très surveillés à l'époque...


sirop_erable__2

Souvenirs souvenirs ! Si on me demandait si j'ai aimé ces temps de durs travaux,
je dirais que oui. Par contre, quand j'en parle ou que, comme ce soir je l'écris,
je ressens toutes les courbatures, les ampoules, les froids intraitables parce que
nous étions mouillés du matin jusqu'au soir. C'est vrai que le "champion" cette
grosse bouilloire alimentée au bois produisait beaucoup de chaleur. Mais nos
vêtements étaient en grosse étoffe et il fallait un temps fou  pour les faire
sécher. De plus, la cabane à sucre n'était pas isolée. Ce n'était qu'un pauvre abri
pour  protéger le "champion" de la neige et de la pluie.

À bientôt Martine

Jean-Claude


L'histoire du sirop d'érable

• Une légende raconte qu'un jour, un amérindien a vu un écureuil mordre dans une branche d'érable et se mettre à boire. L'indien a décidé d'imiter l'écureuil et c'est comme ça qu'on a découvert le bon goût sucré de l'eau d'érable.                         

• Avant 1492, bien avant l'arrivée des premiers colons, les autochtones faisaient une incision dans le tronc de l'arbre avec leur tomahawk et récoltaient le liquide dans un récipient d'argile.                

• Vers les années 1700, les premiers colonsà qui les Amérindiens avaient enseigné la récolte de l'eau d'érable, partaient en raquettes dans la forêt pour entailler les arbres avec leur hache. Une fois l'arbre entaillé, ils y enfonçaient une goutterelle en bois de cèdre qui déversait l'eau d'érable dans une auge de bois.                        

• Deux révolutions technologiques sont venues transformer le travail des acériculteurs vers 1850 : le chalumeau de bois à embout rond et l'arrivée du seau en fer blanc pour remplacer les contenants de bois. Avec le chalumeau, il n'est plus nécessaire d'entailler l'érable avec une hache, on le perce désormais avec une mèche montée sur un vilebrequin.                        

• Vers 1915, on remplace le chalumeau de bois et les chaudières de fer par des instruments de métal. C'est le début de la cabane à sucre moderne.                      

• De nos jours, les acériculteurs qui travaillent encore de façon artisanale font un trou dans l'arbre avec une perceuse.                        

• D'un petit coup de marteau, ils enfoncent le chalumeau de métal dans l'arbre, ils accrochent une chaudière au crochet et l'eau se met à couler. L'eau tombe goutte à goutte. Quand la chaudière est pleine, l'eau d'érable est récoltée.                        

• Heureusement, vers le milieu des années 70, une nouvelle technique est apparue, celle des conduits tubulaires : un réseau de tubulures qui rend la cueillette beaucoup plus facile. Ce réseau de tubes de plastique parcourt l'érablière d'arbre en arbre pour amener l'eau jusqu'à la cabane à sucre.                       

sirop_erable_3                  


Le sirop d'érable, de nos jours

• Au Canada, les provinces productrices de sirop d'érable sont : le Québec avec 93 % de la production nationale, suivi de l'Ontario avec 4 % et du Nouveau-Brunswick avec 3 %. 

• Que les acériculteurs recueillent l'eau d'érable de façon artisanale ou industrielle, elle atterrit dans un grand réservoir situé dans la cabane à sucre.

• L'eau d'érable est ensuite déversée dans l'évaporateur.

• L'évaporateur est une immense bouilloire dans laquelle l'acériculteur fait bouillir l'eau d'érable pour la transformer en sirop.

• La vapeur qui s'en dégage remplit l'air d'une odeur sucrée.

• Quand le liquide a atteint la température souhaitée, le sirop se met à couler.

• Pour classer le sirop d'érable par catégorie, l'acériculteur se sert d'un colorimètre et d'un réfractomètre, un appareil permettant de mesurer avec précision le pourcentage de lumière transmise par le sirop.

• Le sirop est réparti en diverses catégories, de D à AA et de foncé à extra-clair, selon sa limpidité, sa densité et sa saveur caractéristique d'érable.

• Le sirop d'érable sera offert sur les tablettes des marchés dans des boîtes de conserve, des contenants de métal, des cruches et même dans d'élégantes bouteilles de verre.

• À la cabane à sucre, ce qu'il y a de plus populaire, c'est la fameuse tire sur la neige. Pour la fabriquer, l'acériculteur fait chauffer le sirop dans une casserole située tout près de l'évaporateur. Il surveille les nombrils, ces gros bouillons qui se forment en surface. Pour une plus grande précision, il peut utiliser un thermomètre. Lorsque la température atteint 113.8 °C, l'acériculteur étend le sirop bouillant sur de la belle neige blanche.

• S'il avait laissé bouillir le liquide jusqu'à 114 °C, il aurait obtenu du beurre d'érable. Jusqu'à 117.7 °C, du sucre dur. Enfin jusqu'à 123.9 °C, du sucre granulé.

• Peu importe la manière dont les produits de l'érable sont offerts, sous forme de gelée ou de beurre, dans les biscuits ou en bonbons, en thé ou en tisanes... de toutes les façons, les produits de l'érable, c'est tellement bon ! 


Et voici une autre lettre de Jean-Claude reçue le dimanche de Pâques. J'aime sa façon d'écrire et cette nostalgie des méthodes traditionnelles.


Bonsoir Martine

Ici, nous sommes encore ensevelis sous la neige. Au moins 40 cm qui n'ont pas fondu et qui continuent à s'accumuler parce qu'il continue à tomber des flocons bien dispersés, mais réguliers. Un jour viendra où le printemps se pointera à l'horizon et nous aurons des jardins et du gazon. Mais d'ici ce temps, nous continuerons à boire de l'eau d'érable. Un érable de moyenne taille, dans les meilleures coulées (dans les conditions idéales) fournit environ 10 litres d'eau sucrée par jour. Il y a des jours où c'est à peine quelques gouttes alors qu'à d'autres, on peut recueillir cette généreuse quantité.

Je n'ai pas encore "été à la cabane" cette année. Je ne sais pas pourquoi. Mon beau-frère exploite l'érablière qu'il a acheté de papa. Je ne m'y sens plus à l'aise. Il y a tant de différences entre la forme d'exploitation de l'érablière actuelle et celle d'il y a quelques années. Je ne m'y reconnais plus. Les odeurs ne sont plus les mêmes. Et le goût du sirop a changé. Il est tellement doux aujourd'hui qu'il me semble dilué. Pourtant, ce sirop atteint la subtilité des grands crus. Couleur, robe, odeur, goût d'une finesse incroyable. L'industrie qui s'est développé autour de l'érable a fait en sorte que les produits qui en jaillissent demande une acuité de l'odorat et du goût d'un maître pour l'apprécier. Ce que je n'ai pas !

Cependant, pour nous les vieux des cabanes à sucre traditionnelles, rien ne vaut le goût de "boucane", de fumée qui se mêle au sirop parce qu'il est exposé dès l'ouverture des portes du foyer à une exhalation, une fumée de bois d'érable, de conifère et autres bois utilisés pour la flambée. Il y a la tradition plus "frustre", plus aromatisée, plus corsée de l'ancienne façon de faire et celle plus moderne où le sirop devient objet de fines dégustations. Quel est le meilleur sirop ? Celui dont le goût nous rappelle une tradition révolue où celui moderne, subtil, fin d'aujourd'hui ? Pour ma part, après plusieurs années passées à vivre l'artisanat du sirop, il m'est difficile d'accepter les subtilités de la production nouvelle. Question de goût ou philosophie passéiste ?

Quoiqu'il en soit, le temps des sucres est pour nous l'annonce d'un généreux printemps. Encore une dizaine de semaines et nous pourrons affronter les hordes de mouches noires et de "brûlots", vilains insectes bouffeurs de sang et de patience qui sont indissolublement mariés au temps du jardinage. C'est enduits des huiles insecticides ou de moustiquaires que nous irons bientôt travailler nos jardins. À la mi-juillet, les insectes carnivores nous accorderont le répit, mais il nous restera moins de 6 semaines pour encourager nos plantes à produire.

Comme tu peux le voir, notre cher Québec nous a formés. Moins de 4 mois pour semer et récolter et mettre en conserve ! Pour survivre de la terre, il fallait être prévoyant. En très peu de temps, nous avions à semer, entretenir champs et jardins, récolter, transformer et entreposer, tout ça en moins de 16 semaines. Tout le restant du temps était consacré à couper les billots pour la construction d'abris, d'étables, de maisons, à bûcher pour arracher à la forêt des hectares à cultiver, à bûcher  pour accumuler le bois de chauffage nécessaire pour passer l'hiver. Et toutes sortes d'autres corvées essentielles pour assurer la subsistance et surtout la survivance.

Notre pays sait être généreux envers les prévoyants,  les industrieux. Depuis quelque 400 ans, de générations en générations, il nous a fallu apprendre à la dure cette réalité. Cependant, nos "temps modernes" nous font miroiter l'idée que la nécessité n'est plus mère de la vertu. Nous croyons, à tort ou à raison que la technologie moderne nous sauvera de tous les maux anciens de famine, peste et de quête d'énergie. Pourtant, en l'an 2000, nous sommes les êtres les plus vulnérables que la terre ait produit. Nous dépendons d'une énergie dont les sources sont peut-être inépuisables, du moins en ce qui concerne l'hydroélectricité québécoise (énergie qui repose sur des sources plus fragiles encore quand on parle de centrales atomiques). Ce qu'on oublie trop, c'est que tout cela repose sur des moyens de communication extrêment fragiles. Le verglas de 1998 au Québec en a été une preuve convainquante. Et pourtant, aucune politique à long terme pour remédier à cette faiblesse démontrée n'a été mise de l'avant.

Bon ! encore une fois, je m'emballe. Le destin de notre jeunesse me préoccupe au plus haut point. Nous les "pépères, mémères" avons appris la survie avec des moyens qui nous faisaient libres parce qu'on les trouvait autour de soi, pour autant que nos ancêtres nous en eussent appris le mode d'emploi. Aujourd'hui, la connaissance suffisante consiste à mettre le doigt sur un bouton pour établir le contact et si ça ne fonctionne pas, on se réfère à un technicien dans le meilleur des cas, ou encore, pire, on balance l'objet à la récupération (wow ! quelle écucation !), sinon, aux vidanges (Wow ! quel manque d'éducation !)

Voici, à travers mon amour de la vie et surtout de la liberté que procure la connaissance de la tradition, exposé ma philosophie de vie. Je suis entièrement d'accord avec les poussées scientifiques et le développement des connaissances à la seule et unique condition qu'elle ne recèle pas en son sein de la dépendance. Toutes formes de dépendance me choquent incroyablement. Pourtant, je ne suis pas la perfection : la bière et l'informatique, outre ma passion pour le mieux-être font en sorte que je suis esclave autant que celles et ceux qui dépendent exlusivement de l'énergie pour survivre. Je dis la bière et pourtant, je ne peux pas en boire beaucoup avec cette satanée fibro qui me rompt les os et les muscles. À ce sujet, j'ai remarqué que l'ivresse, même légère accentuait l'intensité des douleurs. L'alcool, lorsqu'elle procure ses premières "douceurs" sait très vite se glisser derrière l'euphorie du moment pour installer ses tenailles. Elle sait d'autant mieux les déceler, ces points vulnérables qu'elle sait lire nos moindres gestes. Une friction ici, une pression là qui lui dessinent la carte de nos points faibles. Quel plaisir elle a cette chipie fibro de profiter du laisser-aller d'une fête pour nous vriller au coeur même de ces trop brefs instants de détente un mal qu'elle saura prolonger pendant un temps indéterminé. 

Sur ce, je te souhaite de profiter de ce congé pascal pour te ressourcer. Au fait ! Avez-vous cette tradition d'aller cueillir l'eau pascale, c'est-à-dire de puisser à même un ruisseau l'eau avant que le soleil du jour de Pâques pointe à l'horizon. Ici, c'est encore de tradition. Et j'ajouterais que c'est une tradition qui, dans le milieu plus orthodoxe du catholicisme québécois renaît !

A bientôt.

Jean-Claude.                                                      



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Commentaires
D
Le bon sirop d'érable je ne peux pas m'en passer, et j'en mange à l'année.. je me fais même un bon potage avec du sirop d'érable c'est délicieux...<br /> C'est l'un des bons moments au Québec la cabane à sucre et tous ces produits qui nous sont offert et que je ne peux résister...<br /> Merci Martine pour ce P'tit reportage..et si tu viendrai Au Québec à ce moment là..c'est sûr que tu attrapperai ton cuta de calories.. ah ! ah !<br /> <br /> Amicalement Aline xxx Joyeuses Pâques ainsi que ta famille ... bisous xxx
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