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S'il a des amis de droite, Jacques Brel a toujours eu le coeur à gauche. S'affirmant sympathisant du PSU, il n'hésite pas à chanter gratuitement à la fête de "L'Humanité". Mais il fonctionne surtout aux coups de coeur. Fervent admirateur de Pierre Mendes-France, il viendra le soutenir en février 1967 à Grenoble, où PMF se présente aux législatives. Une participation unique dans sa carrière.
La même année, il n'hésitera pas non plus à se montrer avec Gaston Defferre, maire de Marseille. Il apparaîtra même en Une du "Provençal", alors propriété de Gastounet. Avec cette légende: "Oui, je suis aux côtés des hommes de progrès. Car lutter pour l'amélioration de la condition humaine, préserver la dignité de l'individu, ce sont là des idées qui ont été soutenues plutôt par Jaurès que par Napoléon III, n'est-ce pas?" (cité par Marc Robine). Dix ans, plus tard, il chantera "Jaurès".
Mais Brel n'est pas un militant. En fait, c'est plutôt "un arnarcho-idéaliste-libertaire" (Todd) qui, en Belgique, se montre parfois avec un premier ministre de droite.
Dans son pays, ce Bruxellois francophone d'origine flamande n'hésite pas à s'attaquer aux Flamands. Et surtout aux Flamingands qui prônent "en matière politique, culturelle et linguistique la limitation de l'influence de la minorité francophone en Belgique" ("Le petit Robert").
En Flandre, la chanson "Les Flamandes" (1959) ne plaît pas à tout le monde: "Les Flamandes dansent sans rien dire Les Flamandes ça n'est pas causant" .
Elle lui vaudra injures et menaces.
En 1966, il va plus loin avec "La... la... la...":
"... J'habiterai une quelconque Belgique Qui m'insultera tout autant que maintenant Quand je lui chanterai Vive La République Vive les Belgiens merde pour les Flamingands"
A son grand plaisir, il déclenche un scandale national. Le gouvernement est interpellé au Parlement. Brel en rajoute avec des déclarations à l'emporte-pièce.
Le sommet de la provocation sera atteint en 1977 avec la sortie de la chanson "Les Flamingants". Le chanteur n'y va pas avec le dos de la cuiller: "Messieurs les Flamingants j'ai deux mots à vous rire Il y a trop longtemps que vous me faites frire A vous souffler dans le cul pour devenir autobus (...) Nazis durant les guerres et catholiques entre elles Vous oscillez sans cesse du fusil au missel (...) Messieurs les Flamingants je vous emmerde"
Sa haine devient "paroxystique", comme dit Todd. Et pourtant... "Avec beaucoup de sincérité", selon Robine, il rappelle, lors d'une interview, que la Flandre, "c'est mon pays. C'est mon enfance". Et d'ajouter: "Je suis plutôt de race flamande. Et j'aime les Flamands".
Et comment en douter à la lecture du "Plat pays": "Avec la mer du Nord pour dernier terrain vague Et des vagues de dunes pour arrêter les vagues Et de vagues rochers que les marées dépassent Et qui ont à jamais le coeur à marée basse Avec infiniment de brumes à venir Avec le vent de l'est écoutez-le tenir Le plat pays qui est le mien"...
Les ouvrages sur Jacques Brel sont légion. Pour ce dossier, nous en avons retenu quatre.
"Jacques Brel, une vie", OIivier Todd, Robert Laffont. C'est la première biographie sérieuse du chanteur, sans doute aussi la plus complète. Une véritable mine, un ouvrage passionnant, avec notamment une discographie.
"Grand Jacques, le roman de Jacques Brel", Marc Robine, Chorus-Anne Carrère. Une autre belle biographie qui vient utilement compléter la première. Les annexes, avec une discographie et plusieurs interviews de proches de Brel, sont particulièrement intéressantes.
"Jacques Brel", Seghers. Il s'agit du premier livre écrit (en 1964) sur le chanteur, en l'occurence par Jean Clouzet. Une seconde édition a été publiée en 2003, revue et augmentée par la fille de l'auteur, Angela Clouzet. Intéressant notamment pour une longue interview de Brel, accordée à Clouzet, et une "interview croisée" où Dominique A, Christian Olivier (les Têtes Raides) et Yann Tiersen parlent du grand Jacques.
"Tout Brel", , Robert Laffont et 10/18 (format poche). Il s'agit de l'édition intégrale des chansons et textes de Brel. Un ouvrage indispensable pour les amateurs. Par contre, on ne comprend pas très bien pourquoi les chansons ne sont pas classées sous leur titre connu du grand public. Ainsi pour Amsterdam, la chanson est classée sous le titre "Dans le port d'Amsterdam", qui renvoie en fait à la première parole... Il n'est donc pas très facile de retrouver un texte. | |
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